L’année 2023 est une année historique pour le corps des administrateurs de l’État. Elle est à la fois un aboutissement et un nouveau départ, on pourrait presque parler de deuxième naissance.

Aboutissement, car depuis le 1er janvier, s’appliquent des dispositions nouvelles que nous avons discutées dans le cadre du dialogue social depuis avril 2021 et qui, pour certaines, correspondent à des percées réelles sur des revendications portées par notre organisation depuis des années. Cette fidélité à nos analyses et nos propositions, mais aussi notre attachement à un dialogue exigeant  mais constructif, ont été reconnus par de nombreux collègues comme le montre nos beaux résultats aux élections professionnelles où nous avions présenté des candidats. Ces résultats étaient loin d’être acquis d’avance, car la réforme des instances représentatives du personnel de 2019, et notamment des commissions administratives paritaires, pouvait priver notre organisation de sa représentativité électorale. Par ailleurs, si nous avions obtenu par la négociation une refondation de l’ensemble du corps et de l’encadrement supérieur de l’Etat, ces bénéfices sont principalement à ce stade collectifs. Réels, mais difficilement individualisables à ce stade. Or si nos collègues peuvent apprécier l’élégance d’une construction juridique qui « marche mieux » et plus sainement, ils sont aussi attachés, et c’est normal, à leurs situations individuelles et celles de leurs collaborateurs et collaboratrices. Si notre employeur a pu se ranger à nos arguments, force est de constater que la communication sur la réforme a été, localement, souvent tardive et parfois incomplète alors même qu’elle suscitait par son rythme accéléré une inquiétude chez beaucoup. Mais la nouveauté de porter des améliorations à la situation de l’encadrement supérieur et dirigeant dans un contexte de défiance profonde de la population envers ses élites administratives pouvait effrayer. A cet égard, il nous appartient également de « faire notre part », après des années d’oubli et de démagogie rampante de la part des autorités politiques, un fossé s’est créé entre l’opinion publique et les hauts fonctionnaires. Nous savons le dévouement à la chose publique, l’immense compétence de nos collègues, la complexité du service de l’État et de l’intérêt général, dont nous sommes les spécialistes, il n’en demeure pas moins que notre place dans la cité est remise en cause, par ignorance et parfois jalousie, et que le rétablissement de notre légitimité exigera du courage et de la transparence. Si notre utilité sociale n’est plus comprise, alors aucune réforme ne produira d’effets durables, et la conduite des politiques publiques continuera à se fragmenter et s’enliser au détriment de l’avenir de nos concitoyens.

Nouveau départ aussi. Depuis le premier janvier, le corps des administrateurs de l’État est indubitablement devenu un grand corps. Il l’est par sa grille indiciaire, le deuxième grade va au-delà de la hors échelle F, le troisième de la G, la fourchette indemnitaire a été augmentée. Le périmètre des fonctions s’est élargi, comprenant désormais une grande partie des emplois les plus prestigieux de l’État. La sécurisation des carrières face au risque d’aléas politique a été améliorée, un pilotage central est enfin mis en place. Dès ce mois, des gains indemnitaires tangibles commenceront à se réaliser au-delà des perspectives de carrière qui sont améliorées. De très nombreux collègues venant des corps mis en extinction ne s’y trompent pas et font jouer leur droit d’option pour nous rejoindre. Ils sont les bienvenus et nous avons hâte que leurs qualités professionnelles éminentes viennent renforcer l’autorité morale de notre corps commun. L’USAE est à leur écoute. Nous avons changé nos statuts pour mieux les accueillir, nous avons tissés des alliances durables avec leurs organisations représentatives, nous apportons la crédibilité de notre capacité de négociation.

Mais ce nouveau « grand corps » est fondamentalement d’une essence nouvelle. Il n’est pas comparable avec les anciens grands corps, car il appartient à une nouvelle époque du service de l’État. La fin de l’expression des indices en échelles lettres est ici un symbole, et les voies d’alimentation du corps en cours de renouvellement. Si les carrières sont mieux « sécurisés », elles doivent dépendre de l’engagement et des mérites des administrateurs et non d’une simple appartenance à un corps juridique ou une histoire personnelle de l’accès aux fonctions. Le corps redevient un support juridique nécessaire à la gestion de l’État et de ses serviteurs, mais l’élément central de la rétribution du service fait, la carrière individuelle, devra s’appuyer sur l’évaluation objective, collégiale, transparente. Le corps a beaucoup changé, en bien. Mais le défi de la transformation de la gestion des carrières est devant nous, et à l’échelle de l’État il s’agit d’une petite révolution. Nous devons aussi changer les habitudes, et pour cela changer les perceptions. Un nouveau paradigme s’élabore, il est encore jeune, fragile. Il exigera pour réaliser ses promesses une mobilisation active de tous, sans faille, employeur(s) comme employés et organisations représentatives. Et ceci dans un contexte difficile, où d’autres mobilisations seront nécessaires, pour la préservation du pouvoir d’achat, des retraites, de l’équité. L’agenda social où l’USAE s’engage en 2023, aux côtés de l’UNSA, est chargé, porteur de problématiques lourdes à l’échelle de la fonction publique et du pays. Mais(supprimer « mais » remplacer par « dans ce cadre) rien ne nous fera renoncer à continuer à porter des réformes, les plus utiles et justes possibles pour l’intérêt de tous, à travers tous les canaux qui nous sont accessibles.

 

Je vous souhaite, au nom de notre conseil national et de toute l’USAE-UNSA, une excellente année 2023, pleine de satisfactions personnelles et professionnelles. Pour les secondes nous serons à vos côtés. Et pour les premières, vous pouvez également compter sur la convivialité de notre organisation, ouverte à tous ceux qui trouvent aussi dans leur contribution au bien commun un épanouissement personnel.

JP Lanuit, le 30 janvier 2023